Terre humaine... Vous connaissez?
- 3 août
- 8 min de lecture

Terre humaine. Et là là! Pépère. Jeanne. Antoine. Des noms qui, pour certains, évoqueront de vieux souvenirs. Pour d'autres, peut-être rien du tout. Et pourtant… ils habitent en moi depuis quelques semaines, un peu comme s’ils étaient revenus me souffler quelque chose d’important.
Pépère, avec son regard calme, ses paroles justes et qui incarne cette sagesse tranquille qui n’élève pas la voix, mais qui rassure simplement par sa présence. Jeanne, la mère solide, douce mais ferme, qui tient sa famille debout comme on tient un fil invisible entre les cœurs. Et Antoine, ce père travaillant, ancré, qui ne dit pas tout mais qui est là. Vraiment là.
En les observant vivre, aimer, décider, et parfois flancher, j’ai vu se dessiner les fondements de ce que je cherche à bâtir depuis longtemps dans le monde éducatif : une approche humaine, enracinée, forte et douce à la fois. Une approche que j’ai nommée S.A.G.E. parce qu’elle repose sur la Sécurité affective, l’Autorité bienveillante, la Guidance respectueuse et l’Épanouissement authentique.
Et si je vous parle de ces personnages aujourd’hui, ce n’est pas pour faire l’éloge d’un passé idéalisé. C’est parce qu’ils incarnent, chacun à leur façon, des repères dont nous avons cruellement besoin en éducation. Des repères qui font du bien. Des repères qu’on n’a peut-être jamais complètement perdus… mais qu’on a cessé d’honorer.
Qui aurait cru qu'un jour ceci deviendrait un article de blog. Un titre qui peut sembler curieux lorsqu’on souhaite parler d’éducation. Et pourtant, c’est précisément ce qui m’a poussée à l’écrire. Parce qu’avant d’éduquer, on existe. Avant de transmettre, on ressent. Et avant même d’enseigner, on vit dans un monde habité par des liens, des valeurs, des silences, des tensions, des espoirs. Ces derniers temps, une question m’habite : et si, à force de vouloir tout réinventer, on avait oublié de regarder derrière ? Pas pour s’y enfermer, mais pour y puiser ce qui faisait sens. Ce qui nourrissait les relations humaines, les repères, l’éducation au quotidien, celle qui se vivait dans les regards, dans les gestes, dans les mots simples. J'ai tellement l'impression que ça fait peur, parler du passé en éducation. Je le sais très bien, car quand j'ose, on me regarde avec de grands yeux de condamnation.
Pour revenir à ce titre et toutes les questions qui se sont mises à tourbillonner dans ma tête, je vous explique.
Tout a commencé un soir, presque par hasard. Je suis tombée sur un déclencheur aussi inattendu que puissant : une scène banale d’une vieille série télé, un échange entre deux personnages, un silence lourd de sens. Et là, quelque chose s’est allumé. Pas une révélation spectaculaire, mais une résonance. Une vibration intérieure.
Je vous fais une confidence. Depuis quelques semaines, je me suis surprise à procrastiner devant la bonne vieille boîte à images. Eh oui ! Imaginez-vous donc que je suis retombée dans une ancienne série télé. Pas un suspense haletant, ni une émission moderne à gros budget. Non. Une série toute simple, mais profondément humaine : Terre humaine. Et pourtant… je regarde TRÈS rarement la télévision. Pas que j’y sois opposée, mais disons que mon esprit préfère généralement lire, créer, réfléchir, écrire… Vous savez, ce genre de petit hamster qui ne prend jamais de vacances et qui, en secret, comble parfaitement mes élans intérieurs.
Bon ! D’accord. Je suis peut-être une vieille âme, un peu. S'ajoute à cela mon HPE., mais c’est justement ce qui me garde pleine d’espoir. Ce qui me fait croire que l’humain, malgré tout, est profondément bon. Qu’au-delà du bruit ambiant, des discours éclatés et des technologies envahissantes, il subsiste en nous un besoin viscéral d’authenticité. Un désir de connexion vraie. Cette capacité à se relever, à s’attacher aux choses simples, et à transmettre encore et toujours ce qui a vraiment du sens.
Pour revenir à ma série coup de cœur… c’est en regardant ces personnages vivre, aimer, se disputer, douter, mais aussi continuer malgré tout, que quelque chose s’est déposé doucement en moi. Une impression familière, presque oubliée. Celle d’une humanité sincère, imparfaite, mais profondément présente. Une humanité qu’on ne crie pas, qu’on ne montre pas pour être applaudie, mais qu’on habite simplement, au quotidien.
Par ailleurs, j’ai senti renaître en moi une foi tranquille. Pas une foi naïve. Pas une illusion de perfection. Mais une confiance douce en cette part de nous qui sait encore aimer, réparer, attendre, prendre soin. Une part de nous qui résiste au cynisme ambiant, à la superficialité, à la déconnexion. Ces personnages m’ont rappelé que l’humain, dans toute sa complexité, demeure capable de grandeur… dans les gestes les plus simples. Et si cette grandeur ne résidait pas dans ce que l’on fait, mais dans la manière dont on continue d’être, malgré les heurts, les pertes, les changements ? C’est cette humanité là que je veux nourrir. Celle qui ne fait pas de bruit, mais qui transforme. Celle qui, justement, me donne envie de croire encore en l’éducation.
Ce qui m’a fait du bien, profondément, c’est de regarder une histoire teintée de vraie vie. Une vie sans artifice, sans effets spectaculaires, sans surenchère dramatique. Une histoire où les émotions ne sont pas amplifiées pour capter l’audimat, mais simplement vécues. Avec pudeur. Avec justesse. Loin de ce que l’on voit trop souvent aujourd’hui à l’écran : l’envie, la jalousie, le besoin de performance, les conflits montés en épingle, les personnages qui s’aiment pour se trahir aussitôt.
De même, Dans Terre humaine, il n’y a pas de faux suspense. Juste des humains. Qui traversent la vie, chacun à leur manière. Et étrangement, c’est ce calme, cette lenteur, cette sincérité qui m’a touchée. Parce qu’elle m’a ramenée à ce que j’essaie de cultiver depuis toujours : une vie enracinée, vraie, humaine. Une vie où l’on ne cherche pas à briller, mais à exister pleinement. Peut-être croirez-vous que je suis trop intense? Possible. Mais j’assume. J’ai toujours eu un faible pour ce qui fait vibrer l’âme… même si ça vient d’un téléroman des années 80. (clin d'oeil)
D'autre part, ce qui m’a troublée et émue en l'écoutant , c’est à quel point elle incarnait, sans le savoir, les grands fondements de l’approche S.A.G.E. que je développe depuis quelque temps. Comme si, bien avant les mots, ces principes existaient déjà, ancrés dans une façon d’être, de vivre, de transmettre. Ce n’était pas théorique, ni pédagogique : c’était vécu. Naturellement. Avec ses maladresses, mais aussi avec cette sagesse instinctive qu’on reconnaît chez ceux qui éduquent en marchant aux côtés de l’enfant, sans l’écraser, sans le délaisser. Et c’est là que tout s’est éclairé.
Produite entre 1978 et 1984, Terre humaine raconte le quotidien d’une famille agricole du Québec. Une famille avec ses traditions, ses conflits de génération, ses douleurs silencieuses, ses deuils, ses décisions difficiles… et son amour, souvent pudique mais profondément enraciné.
Et si, au fond, ce portrait n’était pas si loin de notre réalité d’aujourd’hui ? Une réalité que l’on tente parfois de dissimuler, ou que l’on reformule sous forme de victimisation. Comme si nommer la douleur ou la confusion exigeait désormais un filtre dramatique pour être entendue.
Néanmoins, cette série nous rappelle une vérité simple : la modernisation ne peut effacer les fondements de la vie humaine. Et vouloir transformer l’effet sans s’intéresser à la cause… c’est courir à vide. L’humain, lui, reste traversé par les mêmes enjeux : aimer, perdre, choisir, transmettre. Et c’est là, justement, que tout commence.
Alors que je regardais les épisodes les uns après les autres (oui, je l’avoue, j’ai presque fait du « binge-watching » à l’ancienne 😅), je me suis surprise à penser :« C’est exactement ça que je veux exprimer dans mon approche éducative. »
Revenir en arrière… ou revenir à l’essentiel ?
Dans notre société moderne, tout ce qui est ancien semble souvent dépassé. On célèbre l’innovation, la rapidité, la technologie, le changement constant. Et, trop souvent, on oublie de faire le tri. On avance. On court. On oublie.
Mais cette série, avec son rythme lent, ses longs plans sur les visages, ses silences éloquents, m’a forcée à ralentir. Elle m’a rappelé que dans les gestes du quotidien, dans les relations interpersonnelles, dans les conversations anodines autour d’une table de cuisine… se trouve souvent l’essence de l’humanité.
Et si l’on cessait d’avoir peur de « revenir en arrière » ?Et si, au lieu d’y voir un retour en arrière, on y voyait une manière de reprendre racine ?
Non, je ne suis pas nostalgique d’un monde parfait. Car ce monde-là, il n’a jamais existé. Et ce, même dans Terre humaine. Il y a des silences qui font mal, des enfants qui s’opposent, des femmes qui étouffent, des hommes qui doutent. Mais ce qui m’a marquée, c’est la présence constante d’un tissu humain solide. Un tissu fait de liens, d’efforts partagés, de responsabilités acceptées, de transmission, d’écoute (même maladroite), de résilience.
Et surtout, une chose qu’on a peut-être un peu perdue aujourd’hui : la conscience que l’éducation, au sens large, ne repose pas que sur l’école ou les experts. Elle repose sur une communauté humaine. Une communauté imparfaite, oui, mais présente.
Un miroir sur notre époque!
Ce qui m’a troublée, positivement, c’est de voir à quel point les enjeux d’il y a 40 ans sont encore d’actualité. Les conflits de génération. La difficulté de dialoguer entre parents et enfants. La recherche de sens dans le travail. La place des femmes dans la société. La peur du changement. La solitude dans les décisions éducatives.
On a beau avoir changé d’époque, on n’a pas tout réglé. Mais avons-nous gagné en humanité ? Pas toujours.
Terre humaine nous montre que l’éducation, ce n’est pas juste transmettre des savoirs. C’est vivre avec, écouter, ajuster, échouer, recommencer. C’est dans cette simplicité que certains jugeraient dépassée que j’ai vu une piste puissante pour notre présent.
L’approche S.A.G.E. : un pont entre deux époques
Depuis un moment, je travaille sur une approche éducative qui me tient profondément à cœur : S.A.G.E. Je vous en parle depuis le début de cette article. Une approche qui ne cherche pas à tout réinventer, mais plutôt à réunir ce qui, à mes yeux, mérite d’être rassemblé :
la sagesse du passé
la bienveillance du présent
l’engagement vers un avenir plus enraciné et humain.
Car non, vouloir ralentir, ce n’est pas refuser le progrès. Et oui, l’éducation peut retrouver du souffle… si l’on accepte de retrouver du sens. En écoutant cette série, je me suis dit :« Voilà. C’est ça. C’est exactement ça que je veux transmettre. » Pas une méthode rigide. Pas une recette magique. Mais une invitation à redevenir présent. À renouer avec la guidance, la patience, l’écoute réelle, les valeurs, les cadres clairs et rassurants.
S.A.G.E. veut dire :
🟢 Sécurité affective
🟣 Autorité bienveillante
🟠 Guidance respectueuse
🟡 Épanouissement authentique
Et tout ça, je le vois dans les scènes de Terre humaine.
Quand un grand-père prend le temps d’expliquer au plus jeune pourquoi on ne vend pas une terre comme on vend un objet. Quand une mère, malgré la fatigue, prend un moment pour rassurer son enfant. Quand les conflits explosent… mais qu’on revient toujours autour de la table.
Et si on semait autre chose ?
Il y a quelque chose de profondément rassurant à se rappeler que nous ne sommes pas les premiers à vivre ce que nous vivons aujourd’hui. Les parents d’hier doutaient aussi.
Les enfants d’hier cherchaient aussi leur place. Les communautés d’hier se débattaient elles aussi avec les changements. Mais il y avait des repères. Pas parfaits. Mais présents.
Aujourd’hui, on a beaucoup de ressources, beaucoup d’informations… mais pas toujours plus de sens.
Ce que j’ai envie de semer, avec S.A.G.E., c’est une vision différente :
Moins de performance, plus de présence.
Moins de regard sur les autres, plus de réflexion sur soi.
Moins de peur du passé, plus de courage pour bâtir autrement.
Une invitation douce
Je ne sais pas si vous avez déjà écouté Terre humaine. Peut-être que oui. Peut-être que non.
Mais si vous avez un moment, laissez-vous porter. Pas pour l’intrigue. Pas pour la nostalgie. Mais pour ce qu’elle fait émerger en vous. Moi, elle m’a ramenée à l’essentiel. Et m’a confortée dans cette conviction :
Ce n’est pas en allant toujours plus vite qu’on éduque mieux. C’est en étant là. Vraiment là. Avec sagesse. Avec cœur.
Je vous en reparle très bientôt…Mais en attendant, j’avais envie de vous partager ce petit moment de vérité. Et si, au lieu d’avoir peur de regarder derrière, on osait regarder mieux ?
Avec tendresse et foi en notre rôle éducatif,
Sandra Mathieu
VIP de l’éducation




Commentaires